EXTRAIT

Marina Bellezza, de Silvia Avallone

« Andrea n’avait pas un rapport facile avec son passé. La plupart du temps, il préférait l’oublier. Mais voilà qu’il se retrouvait à Camandona, avec cette odeur typique des kermesses de village : viande grillée et chiottes chimiques derrière les chapiteaux. Il resta là quelques minutes, à fumer sur les dernières marches. D’en haut, il regardait la clairière où se tenait la fête, comme alors : les banderoles, les cocardes et la musique en direct. Et aussi le marché d’artisanat et produits du terroir. Sur la droite, adossé à un petit bois de bouleaux, l’orchestre jouait un slow sous l’éternel hangar transformé en discothèque. Et autour, comme s’il n’y avait qu’un seul îlot de lumière, l’obscurité stagnait telle une mer calme et cependant hostile. »

Biblio

LOIN DE LA DOLCE VITA

Marina Bellezza

Silvia Avallone

Liana Levi, 542 pages

4 étoiles

À 30 ans, Silvia Avallone est un véritable phénomène de la littérature italienne. Son premier roman, D’acier, mettait en scène deux adolescentes, amies soudées dans les tempêtes, en plein cœur de l’Italie berlusconienne. Le portrait social de l’Italie est toujours l’un des moteurs de Marina Bellezza, un roman dans lequel les rêves sont broyés par un monde trop vulgaire ou trop désenchanté. À Valle Cervo, dans un monde rural en plein déclin, Andrea, fils d’un notable, approche de la trentaine. Il rêve d’alpages et de grands espaces, et n’a jamais oublié Marina, une jeune fille si belle qu’elle en devient terrible. Marina, elle, croit que la gloire et l’argent facile pourront guérir ses blessures d’enfance. Entre Andrea et Marina, un amour très fort et des désirs irréconciliables. Ce deuxième roman peint un portrait très fin des jeunes dans la vingtaine, héritiers d’un monde en pleine désagrégation. Avec le même souci social et politique qui animait son premier roman (et grâce à l’excellent travail de traduction de Françoise Brun), Silvia Avallone fait une description très touchante et pourtant très alarmante de l’Italie contemporaine. Loin, bien loin, de la dolce vita.

— Anabelle Nicoud, La Presse

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